vendredi 31 octobre 2014

Paris, capitale du vin Nature...

             

...Ou en tout cas autoproclamée comme telle, car l'autosatisfaction n'est pas la moindre des "qualités" de notre faune parisienne. A Paris, pour exister faut savoir jouer de son ego, et le prototypique parisien se doit en ce moment de passer par une initiation au vin naturel, c'est tendance...alors dansons!
 Paris dé-nature donc le vin et fait fructifier le capital et pas n'importe lequel, le vertueux, celui de goche. On ne compte plus les salons au noms évocateurs tout droit sortis de cerveaux ségueliens: Les Affranchis, Les Beaux Macs,...A quand les Chevilles Fines?
 Quand le très subversif Rue 89, crée par des journaleux de Libéra-sion se lance aussi dans l'aventure, on se dit que la cause est plutôt mal barrée...on comprend aussi pourquoi certains de mes articles, pourtant simples constats de la sionisation à marche forcée de notre pays, m'aient attiré les foudres de la bienpensance p(h)arisienne. Ici même, sur ce blog, les réactions les plus agressives sont venues de ce coin là avec la condescendance habituelle du parisien en butte à un manant provincial récalcitrant à courber sa couenne, extrait: "...Mais contente toi donc de faire du vin justement, retourne donc bosser dans les vignes..." On notera le tutoiement de rigueur, pas celui du camarade, non, celui du maître qui fronce les sourcils devant le serf qui renâcle, ose penser, et O horreur et décadence se permet d’émettre une critique alors qu'il n'est qu'un inculte tout juste bon à trimer aux champs.
Le guguss confesse tout de même que mon pinard est pas dégueu (ouf) mais que je suis
un poil extrémiste (comprendre, refuser de mettre un truc qui pue, le soufre, dans mon vin c'est pousser un peu loin) et que donc désormais il se tournera vers des "vignerons plus cool", sulfito-compatibles? 
Merci jeune homme, vous m'avez ouvert les yeux sur ce qu'est la clientèle parisienne qui boit " nature" et qu'on nomme bobo, li-li ou plus didactiquement, culturo-mondaine. Depuis quand je passe sur Paris je regarde avec un œil nouveau tous ces guignolos qui se la racontent, voire même qui Nous la racontent, eux qui n'ont jamais dû tenir en main une pioche et qu'une journée à bosser dans les vignes rendrait peut être un poil plus humble face à leur godet. De manière définitive "Le vin c'est plus facile d'en parler que d'en faire", disait un camarade.
A Tokyo, autre place forte du vin de campagne, on ne s'y connait pas plus mais on a au moins la sagesse de ne pas le prétendre et un certain respect pour notre boulot, ceci pour dire aux vignerons qui culpabiliseraient d'envoyer leur vin en extrême-orientie alors que Paris leur en réclame qu'ils doivent continuer à le faire car il sera toujours mieux bu là-bas qu'ici. Pour ma part, décision est prise de couper définitivement les ponts avec la "prétentieuse citée", que mes deux clients, Le Verre Volé et Le Baratin sachent que je n'ai rien à leur reprocher et qu'ils ont été des commerçants honnêtes à mon égard. Cela dit leur récente mise en place du "deux services le soir" ( t'ingurgites, tu payes et tu dégages) ne laisse rien augurer de bon...
Pour le reste, courage aux collègues qui doivent "monter" à la capitale pour (se) vendre, coûte que coûte, refaisant le chemin que naguère la domestique bretonne et le ramoneur savoyard empruntèrent la gorge serrée et l’échine courbée. Aussi, qu'ils prennent garde au syndrome de la tête qui gonfle et des prix qui s'envolent qui semble gagner l'avant garde idéaliste d'hier, comme toujours rattrapée puis cooptée au son de la petite musique du billet doux.


 "Maintenant (et c'est un phénomène nouveau, énorme, capital), l'intellectuel de gauche vient d'accéder à la consommation mondaine. Et il en est même le principal usager. Pire, encore, il est devenu le maître à penser du monde. Il propose les modèles culturels du mondain. Non seulement il a accédé à la consommation mondaine, mais il en est l'un des patrons. Il a la toute-puissance de prescrire. Et de codifier l'ordre du désir.
Aussi peut-on encore demander à ce nouveau privilégié de renoncer à ce qu'il vient à peine de cueillir ? Il est enfin invité au festin et nous le prions de cracher dans le caviar et de lâcher le morceau. Mais ce qui est le plus grave, le plus décourageant, le plus inquiétant, c'est que cet intellectuel de gauche présente ses nouveaux privilèges comme des conquêtes révolutionnaires. Et nous venons lui demander de reconnaître qu'il est pris la main dans le sac, alors qu'il prétend, de cette main, brandir le flambeau de la liberté.
Et voici ce clerc au pouvoir. Le mensonge du monde va devenir vérité politique, vertu civique. Ce phénomène est d'une portée incalculable. Ce qui était censé être l'opposition au pouvoir va devenir l'alibi même du pouvoir. C'est le principe du pourrissement de l'histoire. Et le triomphe de la "bête sauvage" : la société civile. Topaze est devenu le maître à penser du monde, avec les pleins pouvoir d'une mondanité social-démocrate triomphante."
                                                                            Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction. 1981

Toujours aussi visionnaire, le père Céline avait déjà bien cerclé le symptôme parisien dans l'immonnnnde Bagatelles:

"Les humains se traînent dans Paris. Ils ne vivent plus, c'est pas vrai !...C'est horrible à regarder... Ils semblent toujours un peu se débattre dans un suicide...Extirper les masses asphyxiques de leurs réduits, de leur asphalte, les "damnés de la gueule vinasseuse", les arracher du bistrot, les remettre un peu dans les prairies avec leurs écoles et leurs vaches, pour qu'ils réfléchissent un peu mieux, voir s'ils seraient un peu moins cons, les femmes un peu moins hystériques, une fois moins empoisonnés..."

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